Mes notes d’une conférence de J. Ch. PEARCE à OVERIJSE le 29 03 88.
J’ai souvent répercuté ce texte dans mes formations, le jugeant essentiel et en accord avec la philosophie de mes ateliers. Intemporel, toujours d’actualité. J’envisage de le réécrire.
Le cerveau est une structure que s’organise elle-même. Il est la plus haute force qu’on puisse rencontrer.
Toutes les croyances qui nous ont été inculquées au cours de notre éducation sont sérieusement remises en causes par les multiples recherches qui se font actuellement dans le monde entier sur le cerveau, recherches dont les auteurs ont été souvent fortement dérangés par ce qu’ils trouvaient.
Tout se passe à l’intérieur de notre propre crâne, disaient les sages indiens : la création de l’univers entier se passe à l’intérieur. Depuis des siècles, des textes sanscrits expliquent cela. Certaines personnes ont expérimenté cela. Mais le scientifique qui regarde à l’intérieur de lui ne trouve que fractionnement et confusion. Le méditant, lui, perçoit les choses de l’intérieur comme un tout unifié.
Il y a trente ans, on a découvert que notre oeil ne peut pas transmettre d’ondes lumineuses à notre cerveau. Cela implique que le cerveau doit créer sa propre lumière et développer toute sa créativité à partir de sa propre lumière.
Selon BARR, le cerveau crée sa propre lumière par une toute petite molécule qui sature à la fois le cerveau et le coeur : elle permet de traduire l’énergie électromagnétique en ondes lumineuses sans perte d’énergie.
Ainsi, le cerveau crée sa propre imagerie et la répartit, de la même façon qu’il répartit tout l’univers des sons provenant de l’oreille. Avec le son et l’image, et aussi les informations provenant des autres sens, nous construisons toute l’imagerie mentale qui se ramène à un processus unique, à partir des diverses sources d’information que nous avons sur le monde extérieur. Ce processus, en liaison avec le monde extérieur, se passe dans le cerveau sensorimoteur.
Si l’imagerie est purement d’origine interne, elle est traitée par le cerveau émotionnel-relationnel. Elle peut encore être traitée d’une autre façon : par le cerveau le plus grand, le cerveau intellectuel. L’imagerie devient alors abstraite, c’est de la pensée pure, ou de la pensée créative pure. L’imagerie du cerveau intermédiaire, émotionnel-relationnel est une imagerie de rêve, d’imagination, comme dans l’hypnose, la méditation, les visions...
Le cerveau fonctionne essentiellement à partir d’une imagerie, même chez les aveugles de naissance qui ne voient rien à l’extérieur.
Les images du monde extérieur sont perçues par des schémas conçus à l’avance : nous recréons le monde. Mais les images de nos visons sont de la pure création. L’imagination est la capacité de créer des images non données par notre système sensoriel. GeraIt EPSTEIN parle d’un 6ème sens, l’imagination, aussi puissant et utile que les cinq autres : elle peut prendre les sens tournés vers l’extérieur et les tourner vers l’intérieur.
Le cerveau émotionnel constitue un système métaphorique symbolique qui se construit pendant les sept premières années de la vie. Nous le partageons avec tous les mammifères. Par lui. nous établis-sons des relations avec les choses. Chez l’homme, il sert d’intermédiaire entre les perceptions sensorimotrices et le langage abstrait. Il permet donc le développement d’un système de langage.
Nous passons des perceptions sensorimotrices aux perceptions intellectuelles, abstraites grâce au processus symbolique, métaphorique. Vice-versa, nous pouvons réaliser dans le monde concret nos idées intellectuelles grâce au système métaphorique qui agit dans les deux sens.
Toute cette maîtrise de processus symbolique se développe, chez l’enfant, par les histoires qu’on lui raconte, par le "faire comme si". Il apprend à faire passer son image interne vers son image externe, et à changer ainsi le monde extérieur.
Jérôme BRUNNER a souligné cela il y a des années : par le jeu, on transforme métaphoriquement le monde extérieur, on module les métaphores de notre réalité, on change donc notre réalité. Dans l’enfance, dès l’enfance, on apprend à participer au processus de création.
Tous les enfants désirent participer à ce processus de création. La nature ne produit pas du non-productif. L’enfant est poussé d’instinct à ce processus de création parce que, dans la création, se trouve notre survie.
Par le jeu et l’imagination, dans l’enfance, on se prépare a participer à la création et à s’identifier avec le créateur.
Il y a un lien très profond entre l’art et le processus d’apprentissage. (Cf. les écoles de Rudolf STEINER, basées essentiellement sur l’art). L’Université du Massasuchett a étudié les corrélations entre le cerveau émotionnel et les capacités du cerveau cognitif. Ces études ont montré que l’enseignement de l’art amène une véritable imagerie artistique chez l’enfant et une plus grande compétence scientifique.
William BLAKE disait il y a 200 ans que l’art ne pouvait être appris qu’en suivant un modèle. L’art intérieur ne peut exister que par un modèle extérieur.
Les personnes très créatives ont tendance à être poussées à s’occuper des autres. On trouve chez elles un grand idéalisme. Le processus de création est la base du rêve, mais il est, intensément conscient.
Une activité qui contient un haut degré de créativité est la découverte scientifique. David BOHM regrette la perte de créativité dans la recherche scientifique. William HAMILTON décrit le véritable processus de création scientifique en quatre étapes.
1. Le désir passionné d’obtenir des résultats : être saisi par la poursuite elle-même. Il cite l’exemple d’un mathématicien connu, pris par une possibilité mathématique : ça l’a pris complètement au point qu’il ne pouvait plus ni manger, ni boire. ni dormir. Il était comme "possédé" par cette nouvelle passion d’une connaissance aperçue.
Après cette phase, a pris place une phase très longue pour rassembler les informations, essayer de voir toutes les possibilités mathématiques. Cette étape lui a pris 15 ans.
2. il y eut ensuite une période de gestation. ayant épuisé tout ce qui était possible de chercher. il dit : "j’arrête". Il est parti se promener, l’esprit complètement vide.
3. L’EUREKA : arrive une réponse totale. parfaite, en une fraction de seconde, d’une façon étrangement symbolique.
4. Il lui a fallu encore 15 ans pour traduire cette réponse symbolique en langage mathématique.
C’est ainsi que fut trouvé le "quaternion de mathématique" [1] qui est à la base de toute la mathématique moderne.
Pourquoi tout ce travail, puisque la réponse qui vient n’a aucun rapport avec tout ce qui a précédé ?
Pourquoi rassembler toutes ces informations ?
En fait, toutes ces années de travail préparent le terrain pour que cette réponse soit reçue. Ce grand symbole des Quaternions apparu à quelqu’un dans la rue n’aurait pas été reconnu. C’eût été juste une petite tempête mentale. Tandis que le terrain préparé peut recevoir et traduire le symbole.
C’est de cela qu’il s’agit dans la méditation, pour quelqu’un qui est passionné de connaître le soi intérieur. Dès qu’on rencontre les Maîtres, ils nous donnent le résultat, l’Euréka final dès le début du processus. Et tout le reste de votre vie peut être consacré à le traduire dans le concret.
J’ai vu un potier qui faisait un pot magnifique puis le jetait par-ce que le processus de création était fini.
Pourquoi s’accrocher au produit ? S’accrocher, au produit est un comportement d’attachement.
Les Aborigènes d’Australie ont une culture qui a 14.000 ans d’âge. Bien qu’ils n’aient ni vêtements, ni maison, cette société avait, disait Levi-Strauss, la vision cosmologique la plus élaborée de toute l’humanité. Ils menaient une vie de pure créativité. De temps à autre, ils vivaient une célébration religieuse préparée par 3 semaines pendant lesquelles ils peignaient le sol sur des hectares avec des peintures magnifiques, et les écorces d’arbre avec des dessins merveilleux.
Après cela, ils commençaient à peindre leur propre corps en se mouvant dans ce qu’ils appelaient le temps du rêve. Puis alors, ils détruisaient toute trace de ce qu’ils avaient fait. La fête religieuse était l’acte de création lui-même. Ils ne voulaient rien d’autre que d’entrer dans le processus de création. Ils ne faisaient alors plus qu’un avec le Créateur.
Le poète chez les esquimaux était aussi prophète : il pouvait entrer à l’intérieur de l’être. Les mots naissaient à l’air libre pour qu’ils soient entendus cette fois-ci et jamais plus après.
Chez nous, nous avons des oeuvres d’art impérissables à garder. En fait, nous y investissons notre ego. Nous essayons de protéger notre produit pour que notre ego ne meure pas. Ce terrible attache-ment au produit arrive parce que nous n’arrivons jamais a nous identifier au processus.
La nature, elle, ne s’identifie jamais au produit, mais uniquement au processus.
En tant que point le plus élevé de l’évolution, nous sommes appelés à participer au processus de création. Ce désir de créer, en tant qu’adulte, est le même que celui de jouer chez l’enfant, qui est RE-CREATION, qui veut aussi dire jouer. Nous apprenons par là quelque chose du Créateur et à nous identifier à Lui.
Faire de notre vie une oeuvre d’art, c’est entrer dans le processus de création lui-même.
Dans ce processus, il n’y a pas d’événements importants ou non importants. C’est difficile à com-prendre pour mon intellect et pour mon ego. La seule chose importante de notre vie est notre réaction à ces événements.
Toute ma vie, mon intellect m’avait appris à juger tel événement comme plus important que tel autre, telle personne comme plus importante que telle autre, et je m’identifiais aux événements importants et aux personnes importantes.
Le processus d’identification à Dieu est en oeuvre dans tous les événements, importants ou non. Pour faire de ma vie une oeuvre de création, il convient que je traite chaque événement comme égal aux autres, chaque personne comme égale aux autres.
Comment est-ce que je peux réagir de manière égale à chaque événement, à chaque personne ? Ré-agir en tant que Dieu à chaque événement ou personne, pour entrer dans le processus de création divin ?
Il y a une manière d’exprimer à l’extérieur ce que nous faisons à l’intérieur. Devenir pleinement conscient de tous les états différents : sommeil, rêve et veille.
Quand j’ai médité profondément, tous les matins j’entrais en rêve lucide : un état de rêve avec une imagerie magnifique tout en étant entièrement éveillé, entrer dans le processus du rêve et le faire changer, lui donner toutes les formes que je veux. Il y a beaucoup de recherches là-dessus aux USA. La raison en est simple. Il y a un état de conscience encore plus grand que cet état de rêve lucide : l’état de perfection absolue, d’équilibre et de repos de toutes les forces créatives, la méditation comme pure conscience de création, conscience du coeur.
Si vous êtes lié au monde intérieur et pas perdu dans l’hypnotisme du monde extérieur, vous allez sentir cette pulsion subtile de Dieu qui s’éveille en vous, ou plutôt vous-même en vous. Si vous vous tournez vers ce mouvement, c’est la plus grande force dans votre vie.
Cf. le dieu ODlN. La source de la poésie et de la prophétie.
Vision extérieure de l’oeil droit. Vision intérieure de l’oeil gauche.
L’acte de création le plus parfait pour un être humain est de faire de sa vie une oeuvre d’art.
Joseph Chilton Pearce