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Approches récentes sur les cinq sens

S’exercer à percevoir avec ses 5 sens, et même ses « 10 sens », comme je le préconise avec un clin d’oeil, puisque chaque sens a une face externe et une face interne, c’est permettre à chacun de voyager dans le monde sensoriel, pour plus de créativité, une compréhension plus large et profonde, une meilleures mémorisation, une palette plus large pour s’exprimer et se faire comprendre…

Divers auteurs et pédagogues ont développé ces possibilités, la PNL les a conceptualisées dans un but pratique. Des recherches récentes en neurologie ont amélioré la compréhension qu’on avait des différentes fonctions sensorielles. Je les reprends plus spécifiquement ici.

L’article complet auquel je me réfère n’est plus en consultation libre sur internet : Les fonctions sensorielles et la maladie d’Alzheimer : une approche multidisciplinaire], de Kenigsberg PA, Aquino JP, Berard A, Boucart M, Bouccara D, Brand G, et al., Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil 2015 ; 13(3) : 243-58 doi:10.1684/pnv.2015.0553.

Je vous propose donc d’en reprendre quelques éléments ici. (2015)

Les fonctions sensorielles et la maladie d’Alzheimer : une approche multidisciplinaire.

De point de vue de l’enseignement, deux réflexions

 Ce que nous apprend la psycho-neuro-psychiatrie ne peut-elle pas ouvrir de nouvelles pistes pour l’apprentissage ?

 Une éducation multi-sensorielle dès l’école primaire (et maternelle cela va de soi) ne serait-elle pas de nature à stimuler l’activité multi-sensorielle tout au long de la vie (voir aussi “La pleine conscience multi-sensorielle”), ce qui ne peut qu’améliorer la qualité de la fin de la vie ?
En d’autre mots, comment préparer une fin de vie sereine et épanouie dès l’école maternelle ?

L’article dont je parle ci-dessous à propos de la maladie d’Alzeimer met en valeur l’utilité d’une ambiance (environnement et activité) multi-sensorielle stimulante dans toute éducation dès le début de la vie de l’enfant.

Je reprends quelques extraits de cette étude multidisciplinaire (un groupe d’experts de renommée internationale, couvrant un large éventail de disciplines (neurobiologie, neurologie, neurophysiologie, ORL, psychiatrie, psychologie) et un champ d’expertises sensorielles (vision, audition et troubles de l’équilibre, goût, olfaction, proprioception, douleur, neuro-anatomie fonctionnelle, intégration multi-sensorielle)

A propos de la vision

“Quant au système d’orientation spatiale (positionne- ment et navigation), il assure l’une des fonctions cérébrales les plus complexes, puisqu’il fait recours à la fois à des informations multi-sensorielles (visuelles, vestibulaires, tactiles. . .), à la mémoire et au mouvement. Il permet de construire une cartographie cérébrale de l’environnement, et d’avoir un sens de l’emplacement. La découverte de ces structures chez le rat a été récompensée par le prix Nobel de physiologie et de médecine 2014.”
On verra plus loin l’importance de cette cartographie cérébrale, et je ferai le lien avec ce que Eduardo Bono appelle la “bulle sensorielle” ou…

A propos de l’audition

L’oreille interne analyse avec finesse tout l’environnement sonore et l’adapte aux besoins de la personne. Le chaos sonore qui l’entoure devient source d’information dans l’espace et le temps, à condition que cette complexité puisse accéder au système nerveux central et y être traitée correctement. Les émotions auditives, et d’une manière générale tout stimulus auditif entraînant des réactions neuro-végétatives, font l’objet d’une amorce d’intégration au niveau de l’hypothalamus, (…). C’est l’apport indispensable à l’audition pour lui permettre de mémoriser à court et long terme, et pour colorer l’audition d’émotions (mots, musique, alerte. . .). Ces émotions sont responsables d’une très grande quantité de modifications de la perception auditive, allant de la capacité à mémoriser à l’importance que nous attachons aux messages reçus.
Les connexions avec l’aire visuelle sont très importantes. Ces connexions permettent d’une part d’activer des réflexes permettant de tourner la tête vers la source sonore lors de l’alerte auditive et, d’autre part, de mettre en relation des informations dans lesquelles le temps joue un rôle important : le rythme, les fréquences transitoires, le timbre, l’intonation, les hésitations, les tempi, les coupures... Les images sonores deviennent alors associées à des images visuelles, et il n’est plus possible de les individualiser en tant que purement liées à l’audition, dans les traitements ultérieurs de l’information sensorielle [41].
Ici n’est pas le lieu de tirer les conséquences pédagogiques de cette dernière remarque, mais chacun comprendra l’importance de pousser plus loin la réflexion à ce sujet.

A propos de l’olfaction et le goût

Les perceptions gustatives et olfactives doivent être considérées simultanément. La perception olfactive est assurée par deux voies : la voie respiratoire pour les odeurs et la voie rétronasale pour les arômes. Les neurones olfactifs, qui se renouvellent en permanence, sont les seuls neurones établissant un contact direct entre l’environnement extérieur et le système nerveux central.
On savait intuitivement l’importance de l’olfactif, (très développé chez le bébé avant de se perdre, chez nous, tandis que certaines cultures ont gardé vivace cette connexion sensorielle olfactive avec leur développement intellectuel) mais sans avoir pu identifier jusqu’à présent leur importance centrale.

Quant au toucher et la douleur

j’ai été interpellé par le fait que “La peau et le cerveau ont une origine embryologique commune : l’ectoderme. L’environnement tactile est très riche et le sens du toucher permet de reconnaître des stimuli très différents, comme un vent léger, un objet tranchant, une goutte de pluie ou une caresse agréable. Les sensations provenant des neurones sensoriels mécaniques cutanés sont donc qualitativement différentes. Le toucher et la douleur sont étroitement associés. La perception des sensations tactiles nocives (informant d’une menace pouvant toucher l’intégrité du corps) et non nocives dépend de deux catégories distinctes de récepteurs mécaniques, réagissant à des seuils différents de stimulation mécanique. La peau est l’organe sensoriel le plus étendu. On estime que la main humaine comprend 17 000 récepteurs mécaniques, qui permettent par exemple de discriminer la taille, la forme, le poids, le mouvement ou la texture des objets de l’environnement.”

De nouveau ici, le détail des éléments décrits dans la suite de l’article ouvre pour l’apprentissage des perspectives très riches qui dépassent le cadre de cet article. J’invite le lecteur à découvrir ce document qui ne manquera pas de solliciter sa créativité de pédagogue.

Un mot sur l’équilibre

“Un système multisensoriel est responsable de l’évaluation et du maintien de l’équilibre. Les informations proviennent de trois types de capteurs. Le système visuel, le système vestibulaire et le système proprioceptif. Ce dernier, qui permet de percevoir la position et le mouvement des différentes parties du corps dans l’espace, constitue une voie d’entrée fondamentale de l’équilibration.”
Je suis persuadé que l’équilibration n’est pas sans relation avec une notion d’équilibre psychologique et de positionnement de l’apprenant dans le réseau social, au sein de la classe ou à l’extérieur. Ici aussi, des perspectives éducatives se profilent. Travailler avec les élèves sur le tonus musculaire, par exemple, “faire varier la contraction des muscles en réponse immédiate à une information concernant une force extérieure, en utilisant des récepteurs mécaniques cutanés (notamment ceux de la plante des pieds, qui permettent de percevoir les irrégularités du sol) et des récepteurs mécaniques profonds (dans les muscles, les tendons et les articulations, qui tiennent compte notamment de la longueur, de la tension, de la pression et des stimuli douloureux), peut être directement relié à l’image de soi, à la confiance en soi dans l’environnement et surtout, au maintien de l’équilibre dans un environnement en déséquilibre. Je m’explique. Pour garder l’équilibre sur le pont d’un bateau qui tangue, il faut constamment modifier sa posture, la tension musculaire, bref développer une créativité posturale de seconde en seconde, que le petit enfant n’a pas encore et que n’a plus la personne âgée. Je gage que l’enfant ou l’ado qui est à l’aise dans son corps l’est aussi dans ses apprentissages. C’est en tout cas ce que j’ai souvent remarqué dans mes observations des enfants à l’école et au cours de gymnastique.
Il est intéressant de noter que juste pour le moment, en Belgique, les ergothérapeutes revendiquent les mêmes possibilités d’entrer dans les écoles que les logopèdes. Ce qui veut bien dire que les aspects corporels, sensori-moteurs et manuels sont en train de reprendre de l’ampleur dans le champs scolaire.

C’est donc tout naturellement qu’on va conclure par la cognition motrice et la stimulation multimodale

Pendant longtemps, on a considéré la motricité comme étant l’étape finale de la cognition : le cerveau envoie une commande sur les muscles, pour déplacer le corps. Le système nerveux central prédit les conséquences sensorielles de chaque activité motrice. Si les prédictions correspondent à la réalité sensorielle, le cerveau annule les sensations qui ne sont pas importantes, pour ne pas emcombrer la mémoire sensorielle. Ce système permet d’ajuster les actes à l’environnement et de s’adapter à cet environnement. À l’origine de ce modèle, il y a un acte volontaire, passant par une intentionnalité [68].
Quant à lui, le modèle ancien de l’homonculus sensitif (ou somesthésique) de W. Penfield et T. Rasmussen [69], publié en 1950, sépare le cerveau moteur et le cerveau sensoriel.
La neurophysiologie et la neuroanatomie contemporaines ont remis en cause cette vision des choses qui apparaît très limitative, mais qui reste pourtant encore largement enseignée dans les formations professionnelles en santé.

Un mot sur les "neurones-miroir"

“On sait aujourd’hui que les informations sensorielles sont échantillonnées en utilisant plusieurs sens simultanément. La perception et l’action sont couplées. Le cerveau remet sans cesse les informations sensorielles en cohérence et redonne de la signification aux autres, au monde et aux objets avec qui on interagit”.
c’est un traitement multimodal des informations sensorielles, étroitement lié à des processus cognitifs, comme l’attribution d’intentions, et à la conscience de soi. Cette capacité à intervenir sur les autres et le monde, à l’aune de ses propres expériences et perceptions, est appelée « agentivité » (agency en anglais).
Et nous voilà embarqué sur le bateau des neurones-miroir, car le mécanisme concerné, une projection de l’action envisagée vers les zones motrices du cerveau, fait intervenir les neurones-miroirs, une classe particulière de neurones. “Chez l’homme, ils sont situés dans l’aire de Broca, qui est aussi impliquée dans la production du langage, ainsi que dans la motricité fine des doigts” [71] : “Par ailleurs, les neurones miroirs répondent aussi au son produit par le mouvement.
On a donc une combinaison audio, visuelle et motrice. Grâce au mécanisme miroir, les actions exécutées par un sujet deviennent des messages qui sont compris par un observateur, sans médiation cognitive. On a donc là une compréhension des phénomènes d’empathie, parce que “les neurones miroirs permettent de se mettre à la place de l’autre, d’apprendre en imitant les actions, en adoptant le comportement de l’autre : ce que je vois l’autre faire, je le simule moi-même pour mieux comprendre ce je perçois à partir de mon propre répertoire moteur [73]”.

Il est très intéressant de retrouver ainsi les intuitions de J. Pearce quand il suppose une résonance du langage de la mère chez le bébé, qu’on peut imaginer comme des ondes qui se mélangent : deux cailloux jetés à l’eau en même temps créent des ondes qui se rencontrent et s’influencent en se mélangeant. Pearce expliquait ainsi une sorte d’apprentissage par résonance…
“En observant des actions effectuées par un autre, deux classes d’informations peuvent être obtenues : « ce » que l’acteur fait et « pourquoi » il le fait. Les neurones miroirs sont ainsi impliqués dans la compréhension de l’intention.”

Cela mérite d’y aller voir d’un peu plus près.
En effet, la découverte des “neurones miroirs” - qui ne fait que confirmer des intuitions qui ont déjà été abondamment évoquée - a des implications dans la relation pédagogique. Elle confirme cette évidence qu’on enseigne davantage par ce qu’on est et qu’on fait que par ce qu’on dit, et en particulier ce qu’on dit aux autres qu’ils doivent faire, sans le faire soi-même ! Cela met aussi en évidence le travail de Bandura sur le coaching : la façon d’enseigner la plus efficace est d’être à côté de l’apprenant en faisant avec lui, en montrant ce qu’il y a à faire. L’imitation, facilitée par l’activation des “neurones miroirs” fonctionne mieux que tous les autres processus d’apprentissage (Bandura…)

Les cinq sens établis par Aristote pour donner une signification au monde, aux autres et aux objets de l’environnement (la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût et le toucher) ne suffisent plus : il faut aujourd’hui y ajouter la proprioception [77], qui permet de percevoir la position et le mouvement des différentes parties du corps dans l’espace, la cognition motrice, qui permet de coupler la perception et l’action [78], et la perception de la douleur, qui traduit une menace touchant à l’intégrité du corps [79] [1].

Voir le contexte de mon article dans la démarche de la "Marche consciente".